Philippe Tome nous avait raconté Le cœur de Telenko avant de nous dire
Les jambes de Martha. Nous assistions aux rancœurs de Joe, aux rêves brisés
de Martha, découvrant béat la haine qui les déchirait. Deux visions d’un même
cauchemar, d’une même envie de meurtre qu’haletants nous attendions de voir
conclure. Certains avaient déjà fait leur film, imaginé leurs conclusions.
Pour tous, Tome finit par un tour de passe-passe, avec La mémoire de Dillon.
Il survient dans l’Amérique des laissés pour compte, dans l’accablement
d’un homme dont la triste vie s’est brisée encore plus dans le fracas des tôles.
Un accident qui engendre la haine, une autre forme de haine, une troisième façon
d’espérer la mort de l’autre. Berceuse assassine a livré son
secret, pour ma part dans un final moins intense que celui attendu, mais néanmoins
habile et à l’image de ce polar sinistre et glauque à souhait. Passionnante,
surprenante, remarquablement dessinée, cette Berceuse restera comme un blues
qui pleure l’âme morte de la cité.
Fabrice Leduc |
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