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Corbeyran et ses Stryges
Par Fabrice Leduc (15 mai 2002)

 

 

Le mois d’avril a frémi devant l’apparition programmée des trois séries fantastiques de Corbeyran consacrées aux Stryges (Le Chant des Stryges, Le Maître de jeu et Le Clan des Chimères). Trois albums pour trois scénarios différents dont le moteur reste le pouvoir et l’influence qu’ont sur l’homme ces énigmatiques et prodigieux démons ailés.

Qui sont-ils, d’où viennent-ils, que nous veulent-ils ?

Ne croyez pas que l’habile scénariste répondra beaucoup à ces questions. Une réflexion qui entraîne d’autres questions, à savoir jusqu'à quel point Corbeyran tient à nous emmener et surtout jusqu’où les lecteurs voudront aller ! Car quelles que soient les qualités de ces séries, il faut reconnaître qu’on en sait toujours bien peu sur les Stryges. Alors, joue-t-on de la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine ? A chacun de se faire son opinion, qui variera forcément en fonction des goûts (heureusement) multiples de chaque lecteur.

Pour l’instant place au métier d’un scénariste un peu cachottier et à un univers tout de même fort intriguant.

 

Nivek est de retour pour mettre le pied en plein dans la fourmilière. Sûr, le tome 6 du Chant des Stryges n’ouvre pas beaucoup de nouvelles pistes, mais là, on ne pourra plus dire que vous ne les avez pratiquement jamais vus. Ouvrez grand les yeux, Existences est très spectaculaire.

Mais qui dirige donc la planète ? Le président américain de son bureau de la Maison Blanche ? Les grands groupes industriels qui mixent à l’envi armement, chimie, informatique ? Les Stryges de leur sanctuaire secret.

La réponse semble évidente, même si les hommes multipliant les gesticulations pour faire croire qu’ils ont leur destin en mains. Mais dans Existences, Corbeyran démontre que Stryges et humains sont intimement liés. 

Passé, présent, futur, tout est écrit dans un sombre gouffre ou fin fond de la jungle amazonienne. Nivek, L’Ombre, Galagher, Josh, Nolan pour la NSA ont pris rendez-vous pour une phénoménale découverte. Pas sûr que tous aient envie de la partager !

Ce sixième album du Chant des Stryges joue de l’heure de la rencontre. C’est le moment choisi par Corbeyran pour offrir une sortie de route à de très nombreux personnages. Seuls Nivek et l’Ombre reviendront de cette “descente aux enfers”. Avec une partie du secret enfin dévoilé. Les Stryges sont condamnés, mais leurs fin signera aussi celle de l’humanité. Parmi le nombre infini de possibilités de futurs que cette race a tracé, laquelle prolongera le plus leur survie ? Seule certitude, cette histoire commune peut durer des millénaires comme s’arrêter dans quelques heures.

Avec cette fin de premier cycle, l’action de ce thriller s’emballe un peu, laissant libre cours au dessin très dynamique de Guérineau et au rythme cinématographique du découpage. Corbeyran maîtrise toujours l’allure, ne dilapidant pas ses effets pour mieux conduire sa série sur une longue distance. On aimerait bien sûr en savoir plus, ce sera pour l’ouverture du second cycle, certainement recentré sur un certain Sandor G. Weltman, énigmatique personnage qui se cache derrière un complexe monstrueux de sociétés industrielles.

Rendez-vous en mai 2003, si nos deux auteurs tiennent le rythme d’un album par an.

Le Chant des Stryges T6 : Existences  
Corbeyran, Guérineau & Ruby  
(Delcourt)  

Seconde série dans l’ordre chronologique des naissances dans l’univers des Stryges, Le Maître de jeu joue d’un habile mixage entre fantastique et jeu de rôle, une façon originale de mêler des ambiances lovecraftiennes et le rythme effréné du thriller moderne. Sur l’île venimeuse l’équipe de rôlistes partie en quête d’un énigmatique trésor en est aux règlements de comptes. L’espèce de nazillon nommé Arnold redistribue les cartes, les règles avec un sadisme à toute épreuve. De son côté, Quentin pleure ses parents et veut retrouver celui qui les a massacrés. Dans une ambiance pesante, défis morbides, découvertes macabres vont mener à la créature d’un autre temps qui massacre ceux qui, en fait, s’approchent trop de la crypte et pourraient menacer  la Matrice où se joue la reproduction des Stryges !

La malédiction des Von Harbow va resurgir, du grand-père appartenant à un cercle de nécrophiles au petit-fils qui rêve de bâtir un empire sur le mystère des Stryges.

Corbeyran abat sa deuxième carte fantastique, plus axée sur l’horreur et le côté vénéneux d’une puissance monstrueuse qui a parasité l’homme. Le dessin de Charlet paraît jouer d’un registre assez peu étendu. Peu de détails, des effets de lourdeur, de personnages mal dégrossis. Charlet semble vouloir transcrire le malaise du scénario par une certaine rudesse de trait, des ambiances transcrites par des effets de couleurs assez inattendus... C’est loin d’être réussi, certaines scènes sont ainsi vraiment indigestes (découpage des pages 24-25, couleurs sur les 27, 28, 29, 30...).

Au vu de ce troisième épisode, on peut espérer que Corbeyran ne délayera pas trop son projet. On apprend trop peu de choses à chaque album et un réel effort graphique est à fournir.

Après un début attrayant, Le Maître de jeu perd beaucoup de son intérêt.

Le Maître de jeu T3 : Matrice
Corbeyran & Charlet
(Delcourt

 

 

Univers féodal pour la troisième série strygienne de Corbeyran. Cette fois il nous convie à un procès en sorcellerie. Alors que son fils, Abeau, a disparu et est donné pour mort, Payen de Roquebrune ère dans une inconscience maladive. Dans cet autre monde, il voit une partie du mystère qui entoure la naissance d’Abeau. Les hommes n’aimant pas ce qu’ils ne comprennent pas, ils cherchent vite la sorcière. Ce sera bien sûr Smérald qui paiera, victime de l’inquisiteur Bertaire de Fondfroide. Pendant qu’on s’active à mener au bûcher, d’autres manigancent pour conquérir les terres de Roquebrune. Derrière ces agissements humains, les Stryges se terrent, menacent, tuent ceux qui échouent et envoient les Kobbolds à la recherche d’un enfant perdu !

Une fois encore, Corbeyran insiste sur la trame qui offre le décor à son sujet fantastique. Dans une histoire somme toute fort classique, il sème quelques graines du véritable champ d’action de la série. Les Stryges se font rares, mais montrent un bout de leur nez. Deux enfants représentent l’étrange et la fantastique, les énigmes à venir. Forcément, on sort un peu frustré d’un festin promis où seuls les amuse-gueules passent et repassent, alors que les plats raffinés s’exposent au loin !

Le scénariste a une fois encore ménagé ses effets sur une série au dessin assez classique, efficace mais sans réel éclat. L’envie de bien faire est évidente, mais l’ensemble reste peu surprenant. Voilà une série vraiment trop avare de ses effets.

Le Clan des Chimères T2 : Bucher  
Corbeyran & Suro  
(Delcourt)

 

En fait, après 11 albums à évoquer les Stryges, Corbeyran a créé un réel intérêt des lecteurs (surtout grâce au Chant des Stryges), mais il reste un vrai problème de frustration qui incite certes à vouloir découvrir l’album à venir, mais qui pourrait vite produire un effet de lassitude et donc d’abandon du fait d’absence de développement que l’auteur retient sur les personnages principaux des séries : les Stryges. Et oui, on en veut un peu plus Monsieur Corbeyran. Et si Existences donne un peu plus de matière à ces êtres fantastiques dans un thriller rondement mené, Le Maître du jeu comme Le Clan des Chimères n’ont pas assez d’épaisseur, d’intrigue de fond digne d’intérêt pour se faire pardonner leur imperfections.

Ces trois albums publiés dans le même espace-temps ont créé un petit effet de pur marketing qui favorise bien évidemment la médiatisation des 3 séries dans la profusion de nouveautés à paraître chaque mois. Cela donne un petit avantage à leurs auteurs face à des albums moins ou pas défendus par leurs maisons d’édition. Au final, on constate l’existence d’une série-phare et de deux essais pour profiter de la dynamique engendrée par celle-ci. Pas sûr que ce soit le ticket gagnant, sauf en faisant communiquer ces différentes séries (ce qui se fait actuellement sur d’insignes détails) et en créant des événements conséquents qui viennent rebondir de l’une à l’autre. A savoir si c’est le but final de Corbeyran ou si son idée ne consiste qu’à prolonger au maximum ses différents scénarios. Pour cela, il nous faudra encore un peu de patience !

 

 
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